Oser composer de la musique

Une des principales barrières à la composition, c’est de penser qu’avec peu de connaissances musicales, il est impossible de s’y lancer. Une autre variante est de penser qu’il faut être extrêmement connaisseur pour oser s’y lancer. On voit donc de très bons musiciens effrayés à l’idée d’oser placer quelques notes à eux sur papier à portées…

La peur de ne pas écrire un chef-d’oeuvre du premier coup ? De paraître ridicule à des oreilles plus expérimentées ? En fait il suffit d’oser. Puis de persévérer et de travailler. Car bien entendu, on n’y arrivera pas parfaitement du premier coup. Mais qui a vu les premières partitions griffonnées de Mozart, Bach ou Chopin ? Probablement qu’ils n’en étaient pas fiers eux-mêmes, mais ils ont persévéré et travaillé. Et avec leur talent, ils ont émergé à un niveau très élevé.

Entre interpréter et composer, il y a une différence qualitative. Ce n’est pas nécessairement un degré meilleur de connaissance de la musique ou d’un instrument. Ainsi trouve-t-on de très bons interprètes incapables d’improviser trois notes et d’un autre côté des musiciens ne sachant pas lire une note mais capables de composer des musiques magnifiques.

D’où vient leur aptitude à composer ? Ils osent. Ils ont l’audace nécessaire pour s’y lancer. Comme pour l’apprentissage d’une langue, une fois que l’on connaît quelques mots et phrases, il faut oser se lancer, en sachant bien que l’on fera des fautes. On n’attend pas de connaître par coeur tout le dictionnaire pour commencer à parler (le monde serait bien silencieux…) !

partition plume ratures

Interpréter de la musique, c’est répéter à sa façon ce que quelqu’un a écrit. Même si cela demande un grand talent et s’il est possible de l’interpréter de mille et une manières, la contribution personnelle du musicien reste assez limitée par l’esprit d’origine du compositeur.

Composer, c’est sélectionner ce qui est (ou ce que l’on trouve) esthétique et agréable à écouter. Sélectionner parmi quoi ? Parmi l’infinité des possibilités musicales. Mathématiquement il est possible d’estimer l’ensemble des possibilités musicales mais on rentre vite dans des chiffres astronomiques. Et heureusement d’ailleurs, sinon le répertoire serait limité…

Pour prendre un exemple, si on compose une mélodie de 3 notes prises dans une octave entre Do et Do, le calcul donnera 8 possibilités pour chaque note de la mélodie, donc 8 x 8 x 8 = 512 mélodies possibles. Si on ajoute les notes avec altérations, on arrive à 2197 mélodies possibles. Si on permet d’utiliser des noires, croches et double-croches comme valeurs rythmiques, on arrive à 59.319 mélodies. Tout cela pour 3 notes fortement limitées ! Pour le même exemple mais avec 5 notes, on arrive à plus de 90 millions de mélodies possibles…

Pour un morceau de musique comportant des centaines de notes, où toutes les notes et rythmes peuvent être utilisés et où plusieurs instruments peuvent intervenir, avec des nuances et sonorités différentes, les nombres deviennent tellement élevés que vous pouvez ajouter des centaines de zéros aux nombres calculés ici. Donc soyez rassuré(e)s : il y a assez de possibilités musicales pour que chaque personne sur cette planète puisse composer des millions de musiques toutes personnelles ! L’abondance règne donc…

Mais justement : cette abondance peut probablement dérouter le compositeur novice. Il y a tellement de choix possibles, comment va-t-il s’y prendre ?

La meilleure manière est la manière progressive. D’abord limiter volontairement les choix possibles. Décider par exemple de chercher un thème musical court, limité en hauteur de notes et en n’utilisant que quelques valeurs rythmiques. Puis ajouter des accords, puis choisir des instruments, ajouter des effets,…

Mais la première chose à faire, c’est d’apprendre à oser. A oser placer quelques notes à vous sur la portée et les écouter. Ensuite les garder si elles vous plaisent et les modifier ou tout recommencer si ce n’est pas le cas. Puis recommencer, travailler, corriger, tester, écouter, etc.

Je vous souhaite de bien les utiliser et de découvrir la joie que la composition peut vous apporter. Créer c’est vivre !

Dominique Vandenneucker

Concepteur du logiciel de composition et notation musicale Pizzicato.

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